19 Aprile 2022 - di Salvatore Abbruzzese
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Si la pandémie du Covid19 a affecté aussi bien la France que l’Italie avec des pourcentages semblables de contagions et de décès, le débat sur les mesures de confinement, les gestes-barrières, et le port obligatoire du masque ne s’est pas développé de manière similaire dans ces deux pays du début de la crise en 2020 jusqu’en octobre 2021. En effet, tandis qu’une ample discussion sur les libertés des citoyens s’est tenue en France, c’est un silence étonnant qui s’est imposé pour longtemps de l’autre côté des Alpes, où leur abrogation temporaire semble n’avoir pas posé de problèmes. Le conflit tout à fait âpre et serré s’étant développé dès l’automne 2021, n’efface pas le silence ayant accompagné les dix-huit premiers mois de la pandémie.[1] Si, par contre, un conflit tout à fait âpre et serré s’est déjà développé dès l’automne de cette même année, le silence qui a accompagné les dix-huit premiers mois de la pandémie est néanmoins révélateur d’une dynamique sous-jacente à la société italienne qui mérite d’être analysée.
- A.
L’indifférence italienne envers ce qui ressemble à une sortie du « régime démocratique et libéral»[2] a été accompagnée d’une représentation médiatique simpliste de la vie sociale réduite aux seules activités ordinaires (achats, loisirs, restaurants) auxquelles on pouvait, bien-sûr, renoncer sans difficulté pour « rester sur le divan » si les précautions contre le virus l’imposaient. C’est aussi le silence de l’opinion publique elle-même qui a caractérisé la péninsule. Rien de comparable en Italie aux manifestations qui se sont déroulées en France au cours des quinze premiers mois de la pandémie.
La question mérite d’être posée : comment se fait-il que la liberté des relations humaines ait été si facilement sacrifiée et que la représentation médiatique qui se limitait aux effets sur les loisirs ait été si facilement acceptée ? Comment se fait-il que le primat de la vie biologique, la « vie nue », se soit imposé sans peine dans le contexte culturel italien ?
On émettra ici l’hypothèse que cette différence de comportement face à la suppression temporaire des libertés individuelles n’a rien de banal et que ce décalage entre le silence italien et le débat français découle de deux manières divergentes d’habiter la modernité contemporaine, à la suite de deux parcours différents pour construire l’identité nationale.
Des réactions différentes à des mesures similaires
La pandémie en tant que telle n’a pas eu des effets très différents dans les deux pays européens. L’écart entre les 134 267 décès comptabilisés en France (soit 1,6‰ de la population totale) et les 150 221 en l’Italie (soit 2,08‰)[3] s’explique, en grande partie par une caractéristique démographique : les personnes âgées de plus de 65 ans représentent 20,5% de la population française, contre 23,2% en Italie. Des mesures semblables pour endiguer la pandémie ont été également adoptées : fermetures des locaux, gestes-barrière, interdictions et confinements.
Il est indiscutable que le sentiment de peur, en raison de son incontestable efficacité,[4] a été constamment sollicité tant en France qu’en Italie, afin de garantir l’obéissance du plus grand nombre aux consignes, toute interprétation visant à rassurer raisonnablement le public étant vite écartée au profit de lectures alarmistes. C’est à cet effet qu’on a donné le maximum de publicité au nombre de morts, sans indiquer la proportion de malades guéris et des patients sortis des hôpitaux – ce qui pourtant aurait aidé à atténuer sensiblement l’équation terrorisante entre contagion et décès.[5]
Les mesures anti-Covid adoptées ont frappé la dimension relationnelle de la vie quotidienne sans distinction et sans la moindre attention portée à la nature différente des lieux qu’on allait fermer et des rassemblements qu’on allait interdire. La fermeture des églises et l’arrêt des cérémonies religieuses, y compris des funérailles (le rite le plus universel), ont alimenté considérablement la panique collective. Si la sécularisation des institutions et des styles de vie est depuis longtemps fort visible même en Italie, il reste que les églises demeurent les lieux dans lesquels, même sans pratique régulière ou participation à la vie de la paroisse, la relation privée entre le croyant et son Dieu suit son cours. Décidée par le gouvernement italien le 8 mars 2020 et approuvée immédiatement par le Pape François pour, vraisemblablement, éviter que les réunions de fidèles fussent désignées parmi les responsables de la diffusion du virus,[6] la fermeture des églises, quel qu’en soit le bien-fondé, a produit une véritable suspension du temps.[7]
L’interdiction de célébrer la fête de Pâques, centre de l’année liturgique, a largement contribué à créer l’impression que l’on se trouvait face à un problème d’une gravité exceptionnelle. Si pour les collectivités nationales l’interdiction des liturgies, assimilées à des rassemblements comme les autres, a vraisemblablement signifié une sécularisation ope legis des rites religieux, pour les pratiquants la suppression des rites de la semaine sainte n’a pas constitué une simple surenchère des prohibitions, s’ajoutant à celle des usines et des écoles, mais elle en a changé le sens. En effet outre l’interdiction des gestes ordinaires (par la distanciation sociale, le confinement), on en arrivait à bannir les gestes solennels, ceux qui orientent les premiers. La létalité potentielle du mal sur la terre – pour le dire dans le vocabulaire des représentations religieuses – a blessé et dévasté les cieux en soumettant la relation avec ces derniers au même régime de « vie suspendue ».
Plus généralement, l’univers social a été contraint à une homogénéisation forcée de relations radicalement différentes : attablés dans un café ou réunis dans une salle de cours, entourant un conjoint malade ou émus devant le cercueil d’un parent ou d’un ami, tous ont été soumis aux mêmes restrictions. La vie ainsi aplatie au nom d’une raison sanitaire en proie à la panique, a été privée de la pietas qui est au fondement de notre civilisation, et réduite au régime de la « vie nue ».
Ici aussi, des différences non négligeables sont apparues entre les deux univers nationaux, y compris dans les réactions des catholiques. Si en a pu observer en France une protestation explicite des évêques devant l’impossibilité des messes, avec un recours au Conseil d’Etat,[8] la Conférence Episcopale Italienne, en acceptant les dispositions gouvernementales du 8 Mars 2020 par « sens des responsabilités et d’appartenance à la famille humaine »[9], s’est limitée à souligner le caractère « fortement restrictif » de ces dispositions, qui causaient « souffrance et difficultés ».[10] Ce n’est que le 26 avril qu’elle a marqué son opposition explicite au prolongement des fermetures.[11] De même, si des intellectuels laïcs, croyants et non croyants, se sont manifestés en France avec une lettre collective[12] et si des manifestations de catholiques s’y sont tenues devant les portes des églises,[13] rien de semblable ne s’est produit en Italie où les réactions ont été pour le moins feutrées.
Beaucoup de ces différences s’expliquent par les statuts régissant les rapports entre l’Eglise et l’Etat dans les deux pays. Néanmoins le manque de réactions de l’univers catholique italien traduit l’acceptation d’une sorte d’interdit séculier, porté au nom de la gravité de la menace. En tout cas, les effets de la peur se sont multipliés, de la méfiance à l’égard des jeunes suspectés de contaminer leurs parents et grands-parents aux appels anonymes à la police pour interrompre des fêtes dans des appartements privés, ou à l’interdiction de tout rassemblement, quelle qu’en soit la raison. La pénétration de cette peur dans tous les aspects de la vie sociale traduit une profonde faiblesse du ressort collectif, un épuisement de la société italienne.
Une société à bout de souffle
Durant les vingt dernières années, qui ont enregistré une croissance zéro, le débat politique s’est épuisé. Prise au piège par les démesures d’un système de contrôle administratif progressivement construit pour combattre les actes illicites de corruption et de concussion, l’Italie s’avère désormais incapable de réaliser toute œuvre nécessaire à son développement, étant enfermée dans des temps administratifs incompatibles avec une économie de marché. Le nouveau pont de Gênes, construit en douze mois seulement, n’a été possible qu’en vertu d’une dérogation complète au système des contrôles administratifs.[14]
C’est la faiblesse structurelle de la collectivité nationale italienne, qui vit depuis deux décennies dans un présent constamment menacé par les crises économiques et gouvernementales, les renversements continus de coalitions, les incursions de la magistrature chez les politiciens et les administrateurs, qui produit un désengagement politique et professionnel. Ce contexte d’incertitudes permanentes et de désengagements explicites interdit tout débat sérieux sur les principes de la vie sociale. Toutefois, par-delà les blocages administratifs et judiciaires contemporains, l’obstacle principal tient sans doute à la représentation que l’Italie se fait d’elle-même. Une « dévalorisation identitaire » constitue un trait historiquement dominant dans les comportements et les attitudes du corps social italien.
Une faiblesse historique
Dans le discours de présentation de son gouvernement, le 17 Mars 2021, le Président actuel du Conseil des Ministres, Mario Draghi, n’a pas manqué de reprocher à l’opinion publique italienne son attitude dépréciative vis-à-vis de la collectivité nationale : «J’ai toujours été étonné, et souvent affligé, au cours de ces années, de ce que les autres portent sur notre pays un regard plus favorable que celui que nous portons nous-mêmes. Nous devons être plus fiers, plus justes et plus généreux envers notre pays. »[15] Il ne s’agit pas là d’une question marginale. L’enquête sur les valeurs menée en 1991 avait déjà fait ressortir cette faiblesse de l’appartenance nationale, les Italiens estimant plus important le lien entretenu avec leur commune d’une part et avec l’Europe de l’autre, plutôt qu’avec leur nation.[16] La même enquête, relancée en 1999, avait fait ressortir à son tour, un manque d’«orgueil» national chez les Italiens. Le constat n’est pas inédit. Déjà en 1826 pour un témoin sensible tel que Giacomo Leopardi, l’Italie se caractérise par une absence d’amour envers elle-même, dont « il poco o niuno amor nazionale che vive tra noi »[17] constitue le principal révélateur. La première cause en est l’absence d’une société de pairs – cette forme sociale si évidente dans la société française[18] et qui avait eu ses origines dans l’Italie de la Renaissance. A la place s’est imposé un réalisme débordant sur un franc cynisme qui a fait que « les classes supérieures d’Italie sont les plus cyniques de toutes leurs équivalentes dans d’autres nations ».[19] C’est de cette absence d’estime « constante et profonde » envers ses propres pairs, que se nourrit l’identité nationale, et elle constitue, aux yeux du jeune Leopardi, la raison principale de sa faiblesse. En effet si « le fondement principal de la moralité d’un individu et d’un peuple est l’estime constante et profonde qu’il se fait de lui-même, le soin qu’il met pour la conserver »[20], le désengagement ne peut manquer de se produire une fois que fait défaut cette estime “constante et profonde”.
Une attitude de dévalorisation
Cette défaillance de toute estime nationale refait constamment surface dans l’histoire. La période du grand développement économique est un exemple patent de la construction d’un récit décourageant. A cette époque aussi la comparaison entre la France et l’Italie est révélatrice.
Entre 1945 et 1975 ces deux pays connaissent une période de croissance économique importante, dont résulteront pourtant deux récits nationaux complètement différents. Si pour la France la périphrase des « Trente Glorieuses », lancée par Jean Fourastié en 1979,[21] se répand pour valoriser cette époque, rien de semblable n’apparaît dans la narration italienne. L’expression « miracolo economico », courante chez les historiens italiens, dit exactement le contraire en renvoyant à un événement heureux que rien ne laissait présager : ni les choix des gouvernements, ni l’état de l’industrie nationale, ni les conditions de travail. Le terme “miracle” prive indiscutablement les gouvernements démocrates-chrétiens au pouvoir à cette époque de tout mérite dans cette croissance qui semble advenue malgré eux. En Italie, on se souvient moins des résultats objectifs qui ont été obtenus durant ces années prospères – dédaignés parce qu’ils étaient considérés comme accidentels – que des misères persistantes cachées sous un enthousiasme de surface.
Cette attitude de dévalorisation ne manque pas d’avoir ses « bonnes raisons » qui résident dans la précarité politique, institutionnelle et sociale qui a immédiatement précédé les années de développement. Dans un temps finalement assez court (1943-1953), la collectivité nationale fait l’expérience d’une triple transition : politique d’abord, avec le passage – non sans conflits – de la dictature à la démocratie ; institutionnelle ensuite, avec la transition d’une monarchie constitutionnelle à une démocratie parlementaire ; économique enfin, avec le passage d’une économie agricole à une économie industrielle, marquée par l’abandon des campagnes et l’urbanisation d’une partie importante de la population. On n’insistera jamais assez sur l’incertitude dans laquelle ce triple changement radical a été vécu. Le passage de la dictature à la démocratie tout d’abord ne s’est pas produit dans les meilleures conditions. L’armistice du 8 septembre 1943, avec une armée abandonnée à son propre sort, les flambées d’une guerre fratricide qui traumatisera le Nord de l’Italie, les bombardements des Alliés et les représailles allemandes, constituent autant de faits majeurs alimentant une déception profonde au sein de la collectivité nationale. Cette déception a été d’autant plus cuisante que l’armistice se signale d’entrée par des abandons déshonorants dus à l’irresponsabilité des autorités politiques et à l’incompétence des commandements militaires.[22]
Le passage de la monarchie constitutionnelle à la république parlementaire, établi par référendum en 1946, ne s’accomplie à son tour qu’au prix d’une incertitude signalée par la faible avance du score républicain. Bien que la grande majorité des citoyens se rendent aux urnes (89,1%), seuls 51% s’expriment en faveur de la république tandis que 43% restent fidèles au régime monarchique et 6% voient leur vote annulé. Ce changement fondamental n’ira pas sans émeutes et contestations, surtout dans le Sud, demeuré largement monarchiste.
Mais c’est encore la transformation du tissu économique qui générera les plus grandes tensions. Le mouvement migratoire du sud vers le nord du pays et des campagnes vers les villes sera le véritable fait nouveau.[23] Les départs pour l’étranger n’étant plus la solution prioritaire, l’Italie devint elle-même une terre d’accueil pour la migration interne et ce phénomène constituera l’une des épreuves les plus exigeantes pour les élites dirigeantes de l’époque. Il ne fait pas de doute que la politique des logements sociaux, ainsi que les mesures d’aide sociale et de protection contre le chômage ne purent que renforcer la confiance de la population en un développement qui s’annonçait comme tout à fait possible.[24] Celui-ci sera moins un « miracle » que la conséquence de l’heureuse rencontre entre de bonnes politiques et une forte volonté d’ascension sociale, travaillant de concert au développement d’une « société de l’opulence ». Sont à l’œuvre non seulement le désir de sortir de la précarité économique, mais aussi une forme de déliaison par rapport aux cultures des lieux de départ et de construction d’une nouvelle appartenance. C’est à ce sujet que Guido Piovene, en se référant à l’Italie du Sud, parle d’« émigration morale ».[25]
Or ces différentes transformations qui se succèdent, et parfois se superposent, ne sont pas réunies dans une narration valorisant l’essor économique et social qui se manifeste au cours des années cinquante et soixante. Aucun signe des « Trente glorieuses » dans l’historiographie contemporaine. Aux yeux des intellectuels et des historiens, l’Italie était surtout une collectivité se situant à la queue du développement industriel de l’après-guerre, où tout développement n’était finalement que partiel et contradictoire. En dépit des résultats obtenus durant cette période – de la croissance exponentielle du PIB à la structuration du réseau des autoroutes, de la scolarisation de masse à la diffusion de la société de consommation, de la réalisation des jeux olympiques quinze ans seulement après la fin de la guerre jusqu’à une sorte de prix Nobel décerné deux fois à sa monnaie, la lire, pour sa stabilité[26] – cet essor restera toujours dans l’ombre. L’Italie sera toujours le pays où, d’après Pasolini, « les habitants des taudis sont sortis pour s’acheter une télé ».[27]
Le rôle de l’Eglise et des communistes
Ainsi, l’expérience de la guerre perdue, l’écroulement du prestige des institutions militaires et l’impression d’être dépourvus de toute crédibilité sur la scène mondiale ont largement contribué à affaiblir l’attachement des Italiens à leur collectivité nationale. Disposition collective dont les signes étaient déjà évidents dans les Pensées de Leopardi selon lequel c’est à partir d’un réalisme désenchanté que s’affirme une indifférence funeste.[28]
Toutefois la faible valorisation de ce développement qui a transformé l’Italie tout au long des années cinquante et soixante ne résulte pas seulement de ces antécédents historiques. On ne peut pas passer sous silence le rôle que jouèrent les attitudes et les jugements émanant des deux principales institutions culturelles nationales de l’époque : le Parti communiste italien et l’Eglise catholique. Institutions opérant, à l’évidence, sur deux plans – politique et religieux – radicalement différents mais qui demeuraient des autorités morales toutes deux profondément étrangères à la culture désengagée et frivole de la société de consommation de masse et du divertissement télévisé. Aussi bien l’une que l’autre portaient un jugement critique sur les coutumes des Italiens et surtout sur les valeurs que ceux-ci laissaient paraître.
Dans les débats qui accompagnent la confrontation électorale, le Parti Communiste italien – le plus grand d’Europe – fait de la négation de la prospérité des années cinquante et soixante la base sur laquelle il peut s’appuyer pour dénoncer l’incapacité des gouvernements dirigés par la Démocratie Chrétienne à assurer un développement réel. La modernisation italienne provenant des industries et des pôles technologiques sera toujours évaluée à l’aune de ses défaillances, plutôt que de ses succès.[29]
La critique passera vite du plan politique au plan moral. Le reproche fait à la télévision, gérée par le parti Démocrate-Chrétien, de promouvoir des styles de vie superficiels, marqués par l’emprise publicitaire issue tout droit de l’idéologie petite-bourgeoise américaine et, par-là, profondément suspecte, conduit à une prise de distance critique par rapport à la société de consommation issue des années du « miracle ». « Nous n’avons pas besoin de leur télévision » s’écriait le sévère leader du Parti Communiste Giancarlo Pajetta en 1956,[30] de même qu’un intellectuel de premier plan dans la gauche de l’époque, Umberto Eco, mettait au pilori le présentateur de l’émission télévisée alors la plus suivie « Lascia o raddoppia » en montrant le caractère insupportablement superficiel de son style.[31] Ce sera encore à Pasolini d’affirmer que « c’est à travers l’esprit de la télévision que se manifeste l’esprit du nouveau Pouvoir … la culture de masse, telle qu’elle est, c’est de la sous-culture, voire de l’anti-culture ; et si le phénomène est désormais irréversible – les masses étant une réalité – comme tout phénomène historique, il doit être affronté, corrigé, modifié ».[32] En étant obnubilé par les programmes de divertissement et par les lieux communs de la publicité, on finit par ne point s’apercevoir que le pays est en train de changer de fond en comble.
La narration dévalorisante de la modernisation du pays au cours des années cinquante et soixante se retrouve elle aussi dans l’attitude critique de l’Eglise catholique. Pour celle-ci les Italiens ne peuvent fonder leur émancipation sur les commodités et les plaisirs mis à leur disposition par les avantages d’une société de consommation de masse. Ceux-ci ne peuvent pas s’inscrire parmi les buts majeurs d’un peuple catholique qui doit demeurer indifférent aux leurres de la société de consommation.[33] Si les nouvelles formes du temps libre, tels le cinéma et la télé, sont approuvées par l’Eglise de Pie XII – la multiplication des salles de cinéma gérées par les diocèses fera du cinéma le lieu privilégié d’une réalité paroissiale unissant les activités religieuses aux pôles sportifs et culturels[34] – néanmoins elles restent soumises à une indispensable conscience critique qui invite à la surveillance et à la sélection raisonnée des films et des émissions télévisées.[35] L’idée que la légèreté des programmes télévisés fait obstacle à l’attention intérieure, ressort essentiel de la sensibilité religieuse, finit par hanter les milieux catholiques.[36] Cette disposition n’est pas un simple reflet des valeurs traditionnelles : l’Église de Pie XII, voulant s’opposer à une sécularisation déjà annoncée en France, [37] se veut pleinement protagoniste de la construction de la société future. Elle vise à bâtir une civilisation chrétienne, mais en ignorant la profondeur des transformations en cours tapies derrière la superficialité de la société de consommation et de loisirs.[38]
De ce fait la modernisation de l’Italie, son accès aux biens de consommation de masse et à l’industrie du temps libre, sont constamment rabroués par une critique simplificatrice, portée par les autorités morales cardinales de l’époque. Cette modernisation est surtout dépourvue de l’appui d’un projet collectif capable de lui donner une substance morale et de rendre ainsi les Italiens fiers de leurs succès. Ce n’est pas sans raison que les générations émergentes à ce moment du développement finiront non seulement par se refuser à tout militantisme éventuel – phénomène généralisé qui caractérise la modernité avancée dans tout l’Occident[39] – mais aussi par se séparer de toute sensibilité culturelle critique de la société nouvelle. L’abandon de la pratique religieuse, ainsi que le départ des militants du Parti communiste,[40] frappent les deux grandes institutions concrétisant la critique morale de la société dans laquelle vivent et veulent vivre les nouvelles générations.
Ainsi la collectivité nationale italienne a-t-elle abandonné toute ambition de vie allant au-delà d’une dignité tant bien que mal récupérée et d’un bien-être finalement acquis. Le témoignage d’un « catholique français » resté anonyme, qui affirme l’absence en Italie d’espérances métaphysiques, tandis que ce pays est riche d’espérances pratiques, résume bien cet état de démission culturelle.[41] La constitution d’une identité nationale à même de recouvrer la dimension de la patrie ne rencontre qu’indifférence dans la société italienne. Les résultats électoraux des partis politiques à droite de la Démocratie Chrétienne, le Parti Libéral et le Mouvement Social italien, sont tout à fait éloquents. L’un et l’autre, essayant de récupérer le primat de la dimension nationale comme valeur, ne parviendront jamais à atteindre 3% dans le premier cas et 9% dans l’autre. Ce n’est pas sans raisons qu’Oriana Fallaci pouvait écrire au lendemain de l’attentat contre les Twin Towers en 2001 que l’identité nationale ne s’activait en Italie qu’à l’occasion des événements sportifs.[42]
L’Italie vécut ses « trente glorieuses » en les minimisant, sans vouloir sortir de la subtile dépression morale à laquelle elle est habituée. L’italietta, terre d’arrangements, déjà dénoncée par Dante et Guichardin, n’avait aucune raison de croire en elle-même, surtout après que la dernière aventure « identitaire » menée par le fascisme l’avait menée au désastre.
La reconstruction de l’après-guerre, le décollage économique ne restent donc gravés dans la mémoire collective que sous la forme neutre d’une simple modernisation, ne conduisant qu’à une amélioration de la vie quotidienne des ménages. Sévèrement jugée par les principales autorités morales, laïques et religieuses, la modernisation des années du développement n’aura aucune conscience d’elle-même, et les « trente glorieuses » italiennes ne se signaleront que par les déceptions qu’elles provoqueront. Déceptions pour une Eglise ayant cru cueillir les fruits d’un projet de refondation de la chrétienté, et ayant fait au contraire l’expérience d’une brutale mise à l’écart. [43] Mais déceptions aussi pour le Parti Communiste qui, ayant misé sur une refondation sociale et politique du pays, ayant obtenu gain de cause sur le referendum pour la république et sur la révision de la loi électorale en 1953, vit le pouvoir lui échapper constamment en dépit de sa capacité de mobilisation électorale.[44] L’Italie qui se modernise économiquement sans « progresser » politiquement, resta pour cette gauche politique une franche désillusion. Ces Italiens, imbus de télévision et de publicité d’une part, et de dévotions traditionnelles de l’autre, constitueront une déception pour tous.
C’est à partir de cette dévalorisation fondamentale que s’aggrave le refus de tout rapport actif à une identité nationale. D’où une représentation de soi constamment déficitaire par rapport à celle des autres pays européens : celle d’un pays héritier d’une civilisation disparue et se dirigeant vers une stagnation permanente que les vingt dernières années ne font que confirmer. A ce terme se dessine une « société distinguée de masse » dont Luca Ricolfi a décrit le comportement à la veille de la pandémie et qui se résume par l’union paradoxale de styles de vie somptueux et d’un engagement manqué sur le plan professionnel, mais aussi éducatif et moral.[45]
Savoir reconnaitre ses réussites
L’absence de tout débat sur la perte des libertés personnelles à cause des mesures de confinement trouve sa première raison dans l’état d’urgence dans lequel la pandémie a précipité l’Italie. Mais l’urgence sanitaire est perçue de manière d’autant plus dramatique qu’elle frappe une collectivité nationale qui non seulement pâtit depuis vingt ans d’une stagnation économique persistante, mais surtout a perdu depuis longtemps sa confiance dans les capacités des partis politiques de démanteler une machine bureaucratico-administrative qui ne produit désormais que des blocages. Entravée par une dévalorisation constante de son passé, affaiblie par la stagnation et désespérant d’en sortir, une partie largement majoritaire de la collectivité nationale fait de la « vie nue » l’unique évidence réelle. Cet abandon de toute discussion sur la légitimité de la privation des libertés suppose une indifférence aux enjeux collectifs qui pose problème à son tour.
Qu’une démocratie libérale vive la pandémie dans une tension et une angoisse telles que même l’irruption de la police dans un appartement privé pour contrôler le nombre de commensaux attablés le jour de Noël, ou l’entrée de la gendarmerie locale dans une église pour arrêter des funérailles et infliger une amende aux quinze participants, ne soulèvent aucun débat, est inquiétant. De même le fait qu’un nombre record de demandeurs du vaccin soit atteint dès que le Président du Conseil laisse envisager une possible réouverture de l’univers du temps libre pour le détenteur du « passe sanitaire ». Ces faits et bien d’autres ne révèlent-ils pas la fragilité de nos libertés, ou même leur réduction à la liberté du « temps libre » et du loisir ? L’idolâtrie de la vie et sa réduction à la fête perpétuelle ne sont-elles pas deux aspects d’une même réduction ?
Les années du développement, qui auraient dû construire une fierté nationale, ont été sans cesse banalisées et réduites à leurs dérives consuméristes, comme si le vide derrière elles n’inspirait à personne qu’il était des lacunes à combler et une identité à reconstruire. Finalement une liberté sans contenu collectif et partagé à défendre, c’est une liberté vaine et vite perdue. Durant la pandémie, Bérénice Levet signalait l’exigence des Français de se retrouver avec eux-mêmes[46] : voilà un projet qui pour l’Italie risque d’être irréalisable, car il n’y a pas de retrouvailles à espérer, leur réunion en nation ayant été, pendant de longues décennies, dédaignée et considérée comme n’ayant aucune signification. Si pour Mario Draghi les Italiens devraient être « plus orgueilleux, plus justes et plus généreux » envers leur Pays, et « reconnaître les réussites multiples, la richesse profonde » de leur capital social, l’entreprise qu’il propose à ses compatriotes est tout à fait inédite pour un pays qui pendant plus d’un demi-siècle est allé résolument dans la direction opposée.
Salvatore Abbruzzese
Université de Trento
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NOTE:
[1] Voir M. Brosshard, «Il Covid come otto settembre del liberalismo italiano» in Fondazione Hume, 16 febbraio, 2021, https://www.fondazionehume.it/ et S. Abbruzzese Società in cerca di respiro. L’Italia e le pandemie, Brescia, Morcelliana, 2021 p.213-221.
[2] Voir « Pierre Manent : “Il y a longtemps que nous sommes sortis à bas bruit du régime démocratique et libéral”» entretient avec E. Bastié, in Figaro Vox du 23 Avril 2020.
[3] Source : ECDC, Centre européen de prévention et de contrôle des maladies. Une agence de l’Union européenne, «Mise à jour de la situation COVID-19 pour l’UE/EEE, au 11 février 2022».
[4] Voir à ce propos la réflexion de Chantal Delsol «Chantal Delsol : “Notre maître aujourd’hui? La peur”» Le Figaro Vox du 9.2.2021.
[5] A la fin du mois de juillet 2021 le chiffre officiel des décès en Italie (127.971) était bien connu du grand public tandis que la plupart ignoraient le nombre de malades guéris (4.124.323).
[6] Des néo-catéchumènes qui s’étaient réunis pour un moment de prière près de Naples ont été dénoncés dans les médias à cause de la propagation du virus à cette occasion. Voir «Coronavirus, picco di contagi in Campania dopo un ritiro religioso. Il vescovo: “Nessun rito mistico, nessuno ha bevuto allo stesso calice”» La Stampa 16 Marzo 2020.
[7] Voir à ce propos les observations d’A. Riccardi dans son livre La Chiesa brucia ? Crisi e futuro del cristianesimo, Bari-Roma, Laterza, 2021.
[8] J.-M. Guénois « L’Église saisit la justice pour rétablir les messes » in Le Figaro Vox, du 2 Novembre 2020.
[9] Fr. Ognibene, «Coronavirus. La Presidenza Cei: chiusura delle chiese possibile, la scelta ai vescovi» L’Avvenire, 12 Marzo 2020.
[10] Voir A. Riccardi, op. cit. Chap. VII.
[11] «Coronavirus, la Cei contro il governo: “Viola la libertà di culto”. L’esecutivo: “Presto protocolli per messe”» La Repubblica 26 avril 2020.
[12] « “La liberté de culte ne peut se négocier, surtout en des temps où elle est menacée”, écrivent dans Le Figaro cinq évêques et plusieurs intellectuels catholiques, parmi lesquels Rémi Brague, Chantal Delsol, Fabrice Hadjadj et Pierre Manent. » Extrait de la Tribune collective « Le plaidoyer d’évêques et d’intellectuels pour lever l’interdiction des messes » Figaro Vox du 2 Novembre 2020.
[13] « Covid-19. Pourquoi certains catholiques se rassemblent-ils devant les églises ce dimanche ?» in Ouest-France 16 Novembre 2020. Voir aussi J.-M. Guénois « Interdiction des cultes : quand les catholiques se sont réveillés » Figaro Vox 18 décembre 2020.
[14] Ce pont situé au cœur de la ville de Gênes et stratégique pour le trafic du Sud vers le Nord de l’Italie – dont l’écroulement partiel le 14 août 2018 causant la mort de 43 personnes avait choqué l’opinion publique nationale – a été complètement démantelé et remplacé par un véritable chef-d’œuvre architectural et technologique, inauguré par le Président de la République le 3 Août 2019.
[15] M. Draghi, Discours au Sénat, 17 février 2021.
https://www.repubblica.it/politica/2021/02/17/news/fiducia_governo_draghi_discorso_integrale-287965484/
[16] Voir R. Gubert (éd.) Persistenze e mutamenti dei valori degli italiani nel contesto europeo, Trento, Reverdito, 1992, et G. Pollini “La molteplicità delle appartenenze territoriali” in R. Gubert éd. Valori e appartenenze sociali. Per una valutazione delle nuove territorialità, Milan, FrancoAngeli, 2004, p.27-111.
[17] G., Discorso sopra lo stato presente dei costumi degl’Italiani, Milan, La nave di Teseo, 2021, p,88
[18] Voir B. Craveri, La civiltà della conversazione, Milan, Adelphi, 2001. (Traduit en français par E. Deschamps-Pria, L’âge de la conversation, Paris, Gallimard, 2002).
[19] G. Leopardi, op. cit.p.110
[20] Ibid. p.113
[21] J. Fourastié, Les Trente Glorieuses : Ou la révolution invisible de 1946 à 1975, Paris, Fayard, 1979.
[22] E. Galli della Loggia, La morte della patria. La crisi dell’idea di nazione tra Resistenza, antifascismo e Repubblica, Bari-Rome, Laterza “Economica” 1998. Ce n’est pas sans raisons que l’unique personnalité tenant un lieu institutionnel dans ces années sombres soit celle d’un pontife catholique, le pape Pie XII, qui avec ses radio-messages pendant les années du conflit, constitue l’unique repère pour une population épouvantée et définitivement humiliée. La personnalité de Pie XII joue de ce fait un rôle identitaire essentiel face à la déroute de la classe dirigeante toute entière. Une comparaison avec le général De Gaulle révèle d’emblée la distance entre les deux différents rassemblements nationaux qui, par la suite, se constitueront dans ces deux pays.
[23] S. Abbruzzese, Società in cerca di respiro, op. cit. p.35-37.
[24] Entre 1951 et 1963 le plan de développement des logements mis en place par le ministre démocrate-chrétien A. Fanfani, face à un besoin estimé par Institut nationale de statistique (ISTAT) à environ 9 millions de pièces, réalisera 355.000 logements pour une totalité de 1.920.000 pièces. Voir L. Beretta Anguissola (éd.) I 14 anni del Piano Ina-Casa, Roma, Staderini, 1963. L’Etat-providence, à son tour, sera manifestement généreux : entre 1950 et 1970, les indemnités de retraite passeront de 3,7 à 14 millions. Un rôle stratégique décisif dans cette direction est joué par la Cassa per il Mezzogiorno, société publique pour le financement des industries et la réalisation d’infrastructures pour le développement dans le Sud de l’Italie, instituée en 1950 et restant active jusqu’en 1984. Soulignons également l’action menée par la Cassa Integrazione Guadagni (CIG) introduite par décret en 1947 et ratifiée par la loi en 1951. Cet institut prévoit une aide ou un revenu payé par la sécurité sociale (INPS) en faveur des travailleurs restés sans emploi ou travaillant à temps partiel à cause d’une réduction de la production.
[25] Voir G. Piovene, Viaggio in Italia, (1957) Milan, Baldini e Castoldi, 1993, p.859.
[26] L’Oscar de la meilleure monnaie sera décerné à la lire italienne par le Financial Times en 1957 et en 1964.
[27] Interview de P. P. Pasolini in A. Arbasino, Ritratti italiani, Milan, Adelphi, 2014, p.280.4
[28] Pour Leopardi : « le mépris et le sentiment intime de la vanité de la vie, sont les plus grands ennemis du bien au travail, et les auteurs du mal et de l’immoralité. » (op. cit. p.109)
[29] Cette critique est restée permanente et on en trouve aisément les traces dans l’historiographie actuelle. Voir à ce propos, G. Crainz, Storia del miracolo italiano. Cultura, identità, trasformazioni fra anni cinquanta e sessanta, Rome, Donzelli, 1996, et Il paese mancato. Dal miracolo economico agli anni ottanta, Roma, Donzelli, 2003.
[30] Cité par V. Castronovo, L’Italia del miracolo economico, Bari-Rome, Laterza, 2010, p. 97.
[31] Voir U. Eco, “Fenomenologia di Mike Bongiorno” Diario Minimo, Milan, Mondadori, 1963.
[32] P. P. Pasolini, «Sfida ai dirigenti della televisione» Corriere della Sera, 9 décembre 1973.
[33] C’est bien sur cet aspect moral que repose la ligne de l’hebdomadaire catholique Famiglia Cristiana édité par la Société de S. Paul à partir de 1931 et dont les ventes dépassent un million d’exemplaires par semaine en 1961. Voir à ce propos M. Marazziti, «Cultura di massa e valori cattolici: il modello di Famiglia Cristiana» in A. Riccardi (éd.) Pio XII, Rome-Bari, Laterza, 1984.
[34] Voir C. Falconi La Chiesa e le organizzazioni cattoliche in Italia (1945-1955). Saggi per una storia del cattolicesimo italiano nel dopoguerra, Turin, Einaudi, 1956.
[35] Voir Miranda Prorsus, Lettre Encyclique du Saint Père le Pape Pie XII sur le cinéma, la radio et la télévision, datée du 8 septembre 1957 ainsi que le discours aux participants à l’assemblée générale de l’union européenne de radiodiffusion, qui s’est tenu à Rome, dans le Palais de Castel Gandolfo le 21 octobre 1955.
[36] Voir à ce propos Le incidenze sociali dei mezzi audiovisivi, XXXV Settimana sociale dei cattolici d’Italia, Rome, Edizioni Settimane Sociali, 1962, notamment la relation de Fr. Vito sur « La diffusione dei mezzi audiovisivi: conseguenza e fattore di trasformazione sociale», p.29-47.
[37] H. Godin et Y. Daniel, La France pays de mission ?, Paris, Cerf « Rencontres » 1943.
[38] Voir sur ces sujets les analyses d’un historien tel que P. Scoppola. Cfr. parmi ses publications « Eglise et société dans les années de la modernisation » in A. Riccardi (éd.) Le Chiese di Pio XII, Bari-Rome, Laterza, 1986, p. 3-19
[39] Voir G. Lipovetsky, Le crépuscule du devoir. L’éthique indolore des temps démocratiques, Gallimard, «NRF essais» 1992.
[40] Voir sur cet aspect P. Ginsborg, Storia d’Italia dal dopoguerra ad oggi, 2 volumes, Turin, Einaudi 1989, Vol.II, Chap. VIII, § 9.
[41] G. Piovene, op. cit. p.865.
[42] O. Fallaci, La rabbia e l’orgoglio, Milan, Rizzoli, 2001.
[43] Voir M. Guasco, Chiesa e Cattolicesimo in Italia (1945-2000), Bologne, E. D. B. 2001.
[44] Il ne s’agit pas de sous-estimer les succès électoraux du parti de la Démocratie Chrétienne. Celui n’a cessé de s’imposer de 1948 à 1992, figurant toujours à la première place des suffrages. Ainsi, aux élections pour la chambre des députés, il arrive en tête en 1963 avec 38,28% des votes ; en 1972 la D.C. totalise encore 38,66% des suffrages. En 1979, après la vague terroriste, elle est encore stable, à la première place, avec 38,30%.
[45] L. Ricolfi, La società signorile di massa, La nave di Teseo, Milan, 2019.
[46] B. Lévet «Nous avons besoin de retrouvailles avec nous-mêmes», entretient avec Devecchio Figaro Vox, 11.5.2020.